L’Aïkido à la charnière d’une nouvelle ère
et desDepuis le 22 Octobre 2019 le Japon est entré dans une nouvelle ère. L’ère ReiWa 令 和.
À l’aide des gloses (ci-dessous) ont peut interpréter le sens des idéogrammes, à savoir un “Ordonnancement Harmonieux”.
Pourquoi ce changement d’ère avec un nouvel Empereur ?
Les peuples vivants dans une perspective de développement spirituel font incarner ce qui symbolise l’aspect Central de l’Existence par un individu particulier, dont les activités rituelles vont refléter l’ordonnancement universel. Cet être est vu (idéalement) comme un Souverain-Pontif. Sa position centrale permet aux hommes de fixer le centre des six orients en un lieu unique sur la Terre d’accueil. De même, la nature de ses activités va s’accorder aux tempérances des quatre saisons pour harmoniser les cycles humains avec les cycles universels. Enfin, il va promulguer des décrets pour tenter d’assurer l’équilibre aux flux de l’organisation sociale des individus qui participent à la tempérance de son règne.
Cette fonction au cours du cycle de manifestation d’un peuple – c’est-à-dire depuis le point origine où ce peuple s’est constitué jusqu’au point final où ne subsisteplus que des activités et des rites sociaux liés à des superstitions – va suivre des états d’incarnation propre aux tempérances de ce cycle : développement, apogée, décroissance, déliquescence. Elle sera en pleine efficience spirituelle aux origines pour ne devenir qu’un exercice virtuel à la fin.
Au Japon c’est le Tennō 天 皇 qui tient cette Fonction centrale. Ce terme est composé de deux idéogrammes que l’on peut traduire par Souverain Céleste, Roi Pontif ou Empereur.
L’idéogramme Hoâng en chinois ci-dessus (deuxième terme de Tennō) désigne dans la tradition Taoïste les trois souverains mythiques. On voit que le radical inférieur, Wâng en chinois, désigne l’aspect Pontif du souverain : un axe vertical relie tous les plans de la Manifestation Universelle (Ciel-Homme-Sol). Ce Souverain incarne idéalement (en tout cas au début du cycle) tous les états d’êtres possibles (de l’état Uni à la Conscience Universelle, à celui uni à l’aspect purement plastique de l’Existence, en passant par l’état lié à l’Âme Universelle). Par cet aspect il incarne un aspect synthétique : l’Entendement.
Le radical supérieur, Tzéu en chinois (voir ci-dessous), désigne ce qui est singulier, ce qui a un commencement (donc une fin) et une succession d’états, c’est-à-dire l’aspect dissociatif : le Discernement.
Cette nouvelle ère, une nouvelle étape dans la marche de l’Aïkido ?
Il me semble que cette nouvelle ère coïncide avec une étape importante de la voie de l’Aïki. Tout laisse présager que nous entrons dans une période qui fait suite à ce qu’on pourrait appeler “l’engouement originel” typique de la phase printanière d’un cycle d’un objet de considération. De puissants mouvements ont animé des êtres humains, partis à la rencontre de O’Sensei (et/ou des DoShu qui lui ont succédé) de manière à établir, un peut partout sur la Terre, des Ponts avec la source même de l’AÏkido.
C’est en raison de l’authentique transformation spirituelle de Morihei Ueshiba et de sa fonction “d’instaurateur” sur Terre d’une authentique voie de transformation spirituelle que cet ébranlement a pu avoir lieu. Un appel profond s’est propagé bien au-delà des frontières du Japon, enveloppant sans doute toute notre belle planète, touchant le coeur de nombreux êtres. Il faut remercier ceux qui ont préparé leurs baluchons pour entreprendre un très long voyage vers un pays parfois aux antipodes de leur culture et de leur langue. Il faut admirer le courage qui fut le leur pour oser affronter les peurs et les épreuves qui se sont dressées devant eux.
Derrière ces pionniers, derrière ces âmes conquérantes, se sont alignés des centaines de milliers d’Aïkidoka remplis d’espérances aux natures très diverses. C’est parce que l’Occident a toujours habillé l’Extrême-Orient d’un voile exotique idéalisé, que les disciplines d’origine japonaise sont souvent “mythifiées” et supposées conférer irrémédiablement des vertus extraordinaires à leurs pratiquants. Il ne fait pas de doute que cette vision mirifique est l’une des raisons majeures – même si elle reste tapie hors de la conscience dans les profondeurs de l’être – qui conduit les personnes à rejoindre les tatamis.
Pourtant le chemin est ardu, long, harassant, même pour ceux qui ont été les élèves de O’Sensei et des Doshu. Nous sommes arrivés au moment où la Voie de l’Aïki a pris pied en Occident depuis suffisamment longtemps pour que les premiers pratiquants baignent toute leur vie dans la pratique de l’Aïkido.
Au-delà des bienfaits physiques et psychiques, sans doute bien peu de personnes ont connu une véritable transformation spirituelle. Sans doute y a-t-il dans le peu d’élus une frustration pour un très grand nombre de pratiquants. Aussi, après l’engouement originel et les espérances peut-être mal évaluées, sommes-nous tentés de nous laisser habiter par une grande amertume.
J’aimerais dire plusieurs choses à ce propos.
Comme l’ont expliqué des sages d’autres traditions, tous les efforts accomplis de son vivant en embrassant les techniques merveilleuses d’une voie telle que l’Aïkido, même s’ils ne sont pas accompagnés d’une modification de son état de conscience, sont un acquis pour les états posthumes.
Il n’est pas possible de connaître le nombre de pratiquants ayant connu d’authentiques transformations spirituelles, puisque dans la grande majorité des cas ils gardent leur état caché.
Le nombre restreint de personnes connaissant de leur vivant les états d’une vie spirituelle, n’est pas le signe d’une carence de la Voie de l’Aïki.
Il est vain d’imaginer que les pratiquants non réalisés spirituellement ou semblant avoir une attitude non vertueuse, puissent avoir un effet destructeur sur la Voie ou empêcher ceux qui sont destinés à vivre les états spirituels de les réaliser. Le domaine régent ne peut être atteint par le domaine régi.
Penser que la Voie de l’Aïki telle qu’elle est instituée est imparfaite revient à nier la dimension spirituelle de O’Sensei (puisque cela sous entendrait que contrairement à ce qu’il a affirmé, il n’aurait pas été investi et ordonné par des puissances spirituelles) et de la dimension transcendante de notre Voie (cela sous entendrait que notre voie n’est régie que par la stricte somme des volontés individuelles et non pas par des âmes individuelles baignant dans les Influences Spirituelles de la Voie).
Gardons notre désir de pratiquer les techniques de l’Aïkido, gardons notre respect pour les Shihans, gardons notre amour pour les Doshu et O’Sensei et continuons notre chemin avec joie !
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