N°11 – Philippe – Petite mise en perspective de l’Astrologie Chinoise (I)

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Toutes les sciences d’un peuple traditionnel sont issues de la même source et visent la même finalité. La source est le Coeur même de la tradition. Sous un certain point de vue, on pourrait dire qu’il s’agit d’une sorte d’intellection et de participation existentielle transcendante à laquelle certains hommes peuvent s’unir pour y puiser un savoir-faire dont la forme d’expression prend la couleur particulière d’une représentation cohérente de la complexité existentielle.

La finalité est de permettre aux hommes de continuer à se connaître soi-même (au sens aristotélicien) malgré les changements de manière d’être des hommes se produisant au cours des différentes tempérances saisonnières (cosmiques) du cycle de leur humanité.

La modification de la manière d’être des hommes d’un peuple au cours du temps est une donnée existentielle parfaitement identifiée et inscrite dans la doctrine traditionnelle. Celle-ci explicite entre autres que les arts et les sciences traditionnels vont subir des modifications lors des changements mineurs de l’histoire et que lors de noeuds historiques fondamentaux de nouvelles disciplines émergeront.

Pour la tradition extrême-orientale le Nei Tching Sou Wen, ancien traité de physiologie humaine attribué à l’empereur Houang-Ti – environ 2600 ans avant J.C. (le manuscrit le plus ancien actuellement retrouvé date de 700 ans avant J.C.), consacre son premier chapitre à la doctrine des états multiples de l’être où il est question à la fois des différents degrés de conscience et d’union existentielle de l’homme par rapport à la cohésion universelle et à la façon dont ces différents degrés se traduisent dans le déroulé temporelle de la marche de l’humanité par l’usage de sciences propre à chaque époque.

2600 ans av JC l’Empeur Houang-Ti disait

« Je sais que, jadis, existaient les Tchen Jen.

Ils étaient les maîtres de l’Univers

Et pouvaient contrôler le Yin-Yang,

Respirant littéralement l’énergie du cosmos,

Indépendant les uns des autres,

Ils étaient libre d’esprit,

Leurs tissus ne vieillissaient pas

Leur conférant ainsi la longévité de l’univers Lui-même

Qui est éternel :

Ils vivaient le Tao.

Puis vinrent les Tcheu Jen,

A qui le tao inspirait pureté et vertu.

Ils vivaient en harmonie avec le Yin-Yang,

Respectant particulièrement le cycle des saisons.

Retirés à l’écart de leurs semblables

Et des affaires mondaines,

Ils se concentraient,

Capables d’appréhender l’univers

Par des moyens ignorés,

Ils regardaient et écoutaient

Au-delà du monde actuellement perceptible,

Leur vie fut perfection et Force,

Et certains d’entre eux devinrent des Tchen Jen.

Leur succédèrent les Cheng Jen,

Qui communiait avec l’univers

En suivant le principe des Pa Fong[1].

Ceux-là aimaient à vaquer aux affaires du monde,

Mais ils ignoraient la haine et la colère.

Loin d’être retiré à l’écart de leurs semblables,

Ils s’habillaient avec élégances,

Cherchant même à se distinguer.

Physiquement ils évitaient tout effort ;

Mentalement, ils étaient indifférents

Aux sentiments extrêmes,

S’efforçant simplement d’être calmes et heureux,

Ne cherchant à satisfaire que leur Moi.

Leur corps ne s’usant pas,

Leur potentiel physique et mental

N’était pas gaspillé,

Ils atteignaient l’âge de cent ans.

Ensuite vinrent les Hsien Jen

Dont les lois étaient celles de l’univers.

Ils utilisèrent le soleil et la lune

Comme Index des temps

Et répertorièrent les constellations.

Rapportant leurs observations au Yin-Yang,

Ils fixèrent les dates des quatre saisons,

Vérifiant ainsi les données des anciens.

Communiant avec le Tao

Ils bénéficièrent de la longévité. »

Ce premier chapitre décrit quelles sont les quatre saisons du cycle de manifestation du peuple vivant la tradition extrême-orientale. On distingue très clairement deux degrés différents, l’un où les êtres sont plus ou moins totalement unis au domaine qui régit le monde manifeste (“Maîtres de l’univers ils pouvaient contrôler le Yin-Yang”), l’autre ne regardant que ce qui se manifeste de façon transitoire en un lieu déterminé.

Cette doctrine exprime les différents états que peuvent traverser les hommes et quelles sont les manières d’êtres propres à chacun d’eux. Elle doit être vue à la fois comme l’expression d’une descente ontologique et à la fois comme le chemin décrivant la remontée vers la réintégration de l’Unité avec le Tao.

Le dernier paragraphe correspond très clairement à notre cycle historique, qui, pour ce qui concerne la tradition extrême-orientale, commence avec le règne de l’empereur Houang-Ti dont la soixante et unième année est considérée comme le début du comput des cycles sexagésimaux (60 termes) qui sont à la base du calendrier extrême-oriental servant à d’importantes sciences traditionnelles : agriculture, médecine, feng-shui, Zi Wei Do Shu (Asgtrologie), etc..

L’Astrologie, comme son nom ne l’indique pas, est une science théorique des états multiples de l’être, donnant une représentation synthétique, symbolique et dynamique de la constitution de l’individu en fonction de son moment de naissance dans le cycle de la présente saison cosmique initié par l’empereur Houang-Ti.

Le cycle sexagésimal à la base du calendrier chinois s’appuie sur les principes du Yin-Yang, des trois puissances, des cinq éléments (Wou Xin) et des six énergies (Liou Tch’i). Toute unité existentielle, tant macrocosmiquement que microcosmiquement est la résultante de l’équilibre harmonique qui s’établit entre un cycle énergétique profond (lié à la théorie des cinq éléments) et un cycle énergétique périphérique (répondant à la théorie des six énergies) fluctuant entre les différentes constituantes fonctionnelles de chacun des plans structurels de cette unité existentielle. Il y a plusieurs façons de réaliser le découpage structurel d’un individu. Le premier retenu et le plus général est la division ternaire, correspondant aux trois puissances emblématiques Tien-Ti-Jen ou Céleste-Terrestre-Humain. La tradition extrême-orientale à travers l’équation formulée par Lao-Tzeu, considère que ce qui se manifeste de façon transitoire est nécessairement triple :

“Du Tao procéda Un, puis de Un procéda Deux, Puis de Deux procéda Trois, à partir de Trois tous les êtres se manifestent. »

Cependant, l’être humain est sujet à plusieurs niveaux de variations énergétiques fluctuants identiquement (par la succession de 60 états) mais en respectant des périodes différentes. Elles sont au nombre de quatre :

  • période d’unité annuelle,
  • période d’unité mensuelle,
  • période d’unité journalière,
  • période d’unité horaire.

La tradition extrême-orientale considère que la résultante de la combinaison des deux cycles Wou Xin (5 éléments) et Liou Tch’i (6 énergies) donne 60 temps, ce qui correspond à la combinaison mathématique de deux séries de 10 et 12 termes. La théorie des 5 éléments considère que chacun des 5 éléments correspond à une fonction qui physiologiquement dispose d’un temps Yang et d’un temps Yin. Si l’on considère un organe physique, par exemple, le Coeur correspondant symboliquement à l’élément Feu, dispose de deux temps diastole et systole. Ainsi les fluctuations énergétiques entre les cinq éléments se déclinent en un cycle dénaire (10 termes).

De la même façon pour la théorie des 6 énergies, la fluctuation se décline en un cycle duodénaire (12 termes). Pour cette théorie, les douze termes correspondent à des qualités énergétiques qui sont identifiées de la façon suivante. Une première distinction est faite entre une énergie Yin et un énergie Yang. Ensuite chacune comporte trois niveaux d’activité, Minimum, Moyen, Maximum. Enfin chacun de ces niveaux est envisagé en fonction de sa tendance croissante ou décroissante. On obtient ainsi douze termes qui ont été associés, par commodité mnémotechnique, à une symbolique animale qui sont les signes zodiacaux extrême-orientaux. Il convient de préciser tout de suite qui les douze animaux extrême-orientaux ne sont pas les jalons annuels des douze animaux de la tradition chaldéenne. Ils sont plus spécialement associés aux heures. Le premier animal, le Rat est celui de la première heure extrême-orientale (qui dure deux des heures occidentales) soit 23 heure à 1 heure du matin. Puis vient l’heure du buffle, du tigre, du chat, du dragon, etc..

L’ensemble de ces deux cycles (dénaire et duodénaire) est rapporté à la symbolique de l’arbre, puisque chacun des dix termes du cycle dénaire est appelé tronc, alors que chacun des douze termes du cycle duodénaire est appelé branche. On dit parfois, Tronc élémental et Branche animale.

Le cycle de 60 termes, dit cycle sexagésimal, comporte donc 60 couples Tronc-Branche. Le premier Bois Yin – Rat.

Au final, depuis la première heure, du premier jour, du premier mois, de la 61ème année du règne de Houang-Ti, s’enchaînent quatre séries de cycles avec leur propre période :

  • Les cycles de 60 ans,
  • Les cycles de 60 mois,
  • Les cycles de 60 jours,
  • Les cycles de 60 heures.

La tradition dit que ces enchaînements suivent leur propre cours, sans variation. Les fluctuations énergétiques des êtres sont cadencées sur les cycles luni-solaires, qui sont l’essence du calendrier extrême-orientale.

Pour établir parfaitement ce dernier, un certain nombre de règles doivent être respectées. Il y a le cycle des lunaisons à considérer, puisque celui-ci doit conserver le rythme des 12 mois dans une année même lors des années comportent 13 nouvelles lunes. La tradition impose, pour ces années -à, qu’une lune intercalaire soit déterminée en fonction de critères bien précis garantissant la cohésion harmonique par rapport aux jalons des inter-saisons. Il y aura donc deux mois successifs qui porteront le même binôme Tronc-Branche.

Un autre élément de difficulté est la détermination de la nouvelle année, dont le début correspond au troisième mois astronomique, le premier étant la nouvelle lune précédant le solstice d’hiver. Celle-ci est déterminée par rapport à un lieu fixe. Actuellement il correspond au méridien passant par Pékin.

Avec tous ces éléments, nous voyons que l’individu est immergé dans un ensemble de cycles macrocosmiques de base parfaitement identifiable. Comme son moment de naissance intervient lors d’un binôme bien précis sur chacun des quatre cycles (de périodes annuelle, mensuelle, journalière et horaire), son terrain énergétique se trouvera déterminé avec des forces et des carences plus ou moins prononcées. (Par exemple au printemps le Foie est à son maximum, alors que le Poumon est à son minimum énergétique).

Le thérapeute chinois a (avait) pour rôle de maintenir l’équilibre énergétique de l’individu, en établissant un régime comportemental, alimentaire, environnemental adapté à la nature intrinsèque de celui-ci. En extrême-orient par principe le thérapeute est rémunéré pour que le patient ne tombe pas malade. Il a (avait) à charge de le soigner gratuitement s’il tombait malade.

Dans le Nei Tching Sou Wen on découvre comment un diagnostic pouvait être établi à l’époque de cet empereur. Tout d’abord, la qualité énergétique ambiante était lue à travers toute une série d’indicateurs. Le thérapeute devait connaitre les quatre binômes du moment de la consultation et de la date de naissance de l’individu. L’observation directe des indicateurs astraux et planétaires entrait également dans le diagnostic. Comme chacun des cinq états émotionnels par exemple, ou encore les cinq organes vitaux, sont en relation d’analogie avec l’une des cinq planètes principales du système solaire, il était important d’avoir connaissance suite à une observation directe de l’état de luminosité de chaque planète, de leur écart vertical par rapport à l’écliptique et pour les planètes extérieures de leur situation par rapport à leur moment d’antérogradation.

L’état de santé du patient était déterminé par toute une série d’observations extérieures et intérieures. La tonalité de la voix, la couleur du teint, l’odeur de l’haleine, l’état de la langue, la qualité du regard. Ensuite les poux étaient pris en veillant à respecter le moment par rapport à la lunaison, au moment dans la journée, à l’état de repose du patient (éviter la prise des pouls après un long voyage).

Il est bien évident que l’hygiène de vie d’un individu traditionnel embrasse des considérations très vastes par rapport à l’ensemble des êtres avec lesquels il est en relation immédiate, mais aussi avec ceux de ses lignages agnatiques et utérins. Les liens psychiques persistants après la mort des êtres qui lui sont liés de quelque façon que ce soit, sont des préoccupations fondamentales par rapport à l’équilibre énergétique. Elles sont totalement intégrées dans la manière d’être de chaque individu.

Photo extraite de Chine Informations

Mais le plus important pour les individus participant à une doctrine de l’unité telle que le Taoïsme, comme cela est sous-entendu dans le premier chapitre du traité de Houang-Ti, ce sont les efforts entrepris pour avancer sur le chemin conduisant à se rapprocher des états d’Union au Tao.

Dans la représentation existentielle de la tradition Extrême-orientale où tout organisme unifié est vu comme constitutionnellement triple, l’humanité dans son unité est également triple, ce qui explique qu’à l’image des trois puissances, l’humanité soit envisagée comme constituée de type d’individu en relation analogique avec le ternaire emblématique. Ainsi l’individu est-il plutôt métaphysicien, guerrier ou civil.

L’astrologie chinoise est une science existentielle théorique, qui permet, entre autres, de déterminer notre tendance par rapport à ces trois types de nature humaine en fonction de notre moment de naissance. Chaque élément, l’heure dans la journée, le jour dans le mois, le mois dans l’année et l’année dans le cycle, ainsi que l’heure, le jour, le mois et l’année dans chacun des cycles sexagésimaux, permet de placer sur un champ symbolique incarnant l’être, des indicateurs symboliques. Dans cette astrologie, il y a quatorze indicateurs principaux dont la disposition permettra de déterminer notre nature par rapport aux trois types de nature humaine.

Le champ symbolique, qui est un champ orienté par rapport aux directions et aux saisons, est divisé en douze carrés (appelés aussi palais), qui sont autant d’aspects de l’individu. Ces aspects peuvent être énumérés par série de quatre. Une série pour la structure centrale, une série pour les modalités émettrices, une série pour les modalités réceptrices. Voilà ce qu’elles sont :

Structure centrale allant du Céleste vers le Terrestre :

  • Personnalité (ce qui est hérité en propre de la Vertu du Principe Suprême. C’est le lien avec la verticalité de l’existence, s’étirant entre la Conscience Absolue et la Nescience absolue)
  • Parenté (lien avec le domaine transcendant par héritage utérin et agnatique. C’est le lien totémique)
  • Individualité (lien avec le ou les ancêtres répondants, transmettant par métempsychose une part importante du bagage psychique. C’est la plan de l’être en rapport avec le culte des ancêtres, mais plus particulièrement avec le premier être transcendant ayant vécu la mort et ayant ressuscité)
  • Possessions (Liens en rapport avec le Corps Universel)

Modalités émettrices allant du Céleste vers le Terrestre :

  • Puissance d’enrichissement
  • Puissance d’engendrement
  • Puissance d’union humaine
  • Puissance fraternelle

Modalités réceptrices du Céleste vers le Terrestre :

  • Fonction au regard de l’Autorité Spirituelle (Universelle)
  • Fonction au regard du pouvoir temporel
  • Fonction sociale
  • État de santé

Ces douze aspects au regard de la dimension intégrale de l’être, sont communément transposés de la sorte en occident :

Destin, Parents, Chance, Possessions, Travail, Entourage, Vie sociale, Santé, Finances, Progénitures, Amour, Fratrie.

L’astrologie chinoise dispose de 111 indicateurs appelés par commodité astres. Pourtant ces indicateurs n’ont rien d’astral. D’une part, excepté pour Jupiter, Soleil et Lune, aucun de ceux-ci ne porte le nom d’une planète ou d’une constellation (bien que parfois une correspondance soit établie par convention analogique avec une planète, ou une étoile d’une constellation), d’autre part parce que le placement dans le palais des trois astres susnommés, ne sont pas fait en fonction de leur position réelle au moment de la naissance de l’individu. Le mode de placement est plus complexe et subtil. Par exemple la position de Lune et Soleil qui font partie des 14 indicateurs Primaires, est faite en fonction de la position du palais personnalité (qui dépend de l’heure et du mois de naissance) de l’unité de décennie (qui dépend du tronc de l’année et de la position du palais personnalité) et du numéro du jour dans le mois de naissance.

Jupiter elle tourne systématiquement d’un palais chaque année (une révolution tous les douze ans, ce qui est pratiquement sa période réelle) et ceci invariablement depuis la 61ème année du règne de Houang-Ti. Cependant il faut noter que la période de révolution de Jupiter n’est pas exactement 12 ans, ce qui fait qu’au bout de quelque centaine d’années il y aura un décalage entre la position dans le thème et la position réelle de Jupiter. Ce qu’il faut comprendre c’est que les rythmes biologiques sont des valeurs entières cadencées par les rythmes de l’heure chinoise (les vagues énergétiques dans les méridiens respectent les heures chinoises, ils changent toutes les deux heures occidentales) du nycthémère, des lunaisons et des saisons de l’année. Le macrocosme et les êtres vivent de grandes variations énergétiques qui suivent un cadencement en rapport analogique avec les heures (chinoises) d’une journée. Voilà la raison des douze ans, ce qui est la période de Jupiter à quelques décimales près.

A suivre …

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  1. Les huit vents, les huit trigrammes.

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